Le café radical a suivi de loin l'université d'été de La Rochelle. Pour une bonne part, l'avenir de la gauche s'y jouait. Parmi tous les combattants, Moscovici était à part. Il tenait, à notre avis le discours le plus intéressant ... et en même temps le plus coupé de la réalité. Le plus intéressant parce qu'il parlait des problèmes de fond de la gauche. Le plus coupé de la réalité parce que, comme le café radical le signalait, le parti socialiste a besoin d'un chef avant de savoir où il va. Bref, Moscovici s'est battu. Il a perdu. Il est déçu. C'est normal. Il reste qu'il pense avoir fait bouger les choses et qu'il espère pouvoir apporter à la gauche par la suite.
Si sa seule idée d'organiser des primaires ouvertes à toute la gauche est retenue, le café radical lui en sera à jamais reconnaissant.
Voilà la lettre qu'il adresse à ses amis de "besoin de gauche"
Cher(e) Camarade,
J’ai préféré attendre que l’émotion née de l’échec de l’Université d’été de La Rochelle soit retombée pour te faire part de mon analyse et de ma pleine détermination. Tout, pourtant, concourait à faire de ce rendez-vous une réussite, pour le Parti comme pour « Besoin de gauche ». La participation était nombreuse, les ateliers de qualité, la volonté de travailler des militants et leur aspiration à l’unité patentes. Vendredi soir, notre réunion de contribution fut un moment fort. 500 amis, rassemblés dans une salle surchauffée, ont accepté avec enthousiasme, pour l’immense majorité d’entre eux, et en tout cas à l’unanimité les propositions que je leur ai faites, en tant que premier signataire et après une intense concertation préalable.
Ces décisions étaient claires, et ne laissaient place à aucune interprétation divergente possible : volonté d’aller vers une motion réformiste, refusant la présidentialisation du Parti, exigeant des primaires ouvertes, soutien à ma candidature au poste de Premier secrétaire, dont je n’ai pas fait un préalable -c’est l’élégance et la sagesse- mais que j’ai présentée avec une totale fermeté. Il était convenu de proposer cette démarche aux amis de Martine Aubry et à la « Ligne claire » réunie autour de Gérard Collomb et Jean-Noël Guérini, ainsi qu’au « Pôle écologique », sans ostracisme mais sans contacts privilégiés avec Laurent Fabius, dont nous considérions qu’il ne pouvait être au cœur du renouveau nécessaire du Parti. J’ai reçu l’appui de tous, notamment celui d’Arnaud Montebourg et de Jean-Christophe Cambadélis, qui m’a promis un « contrat exclusif jusqu’en 2011 ». Vendredi soir, nous pouvions être fiers de notre force affirmée et de notre cohérence retrouvée, nous étions en situation d’être le pivot d’un pôle de rassemblement puissant, à vocation majoritaire.
Le samedi fut pour le Parti et pour nous un jour de tristesse. Car les images de cette journée furent exactement à l’opposé de nos décisions : réunion matinale de certains d’entre nous avec Laurent Fabius, Martine Aubry, Benoît Hamon, avec la perspective d’un courant de la « gauche décomplexée », déjeuner fort médiatisé avec les mêmes, sans Hamon. Je précise au passage, et de la façon la plus formelle, que je n’ai pas été invité à ces agapes auxquelles au demeurant, comptable d’une autre logique, la nôtre, je ne me serais pas rendu. Arnaud Montebourg, quant à lui, a vu sa bonne foi trompée, et a rétabli les faits dans un communiqué. Il ne s’agissait évidemment pas d’un malheureux concours de circonstance, ou d’aller expliquer aux amis de Laurent Fabius qu’ils n’étaient pas au centre de notre approche, mais de la poursuite organisée, méthodique, d’une démarche entreprise depuis des mois et inlassablement poursuivie. Je ne discute pas le droit de quiconque de penser que les décisions de notre réunion de la veille n’étaient pas les bonnes, mais alors, il eût fallu proposer une alternative à la contribution, qui aurait tranché par un vote. Par souci de l’unité, nous avions sagement et collectivement choisi de l’éviter, il fallait s’en tenir à cette attitude. L’image de tout cela est terrible : tractations complexes, alliances peu lisibles, non respect du vote des militants. Elles ne sont pas bonnes pour le PS, présenté sous son jour le plus sombre, loin des préoccupations des Français. Elles sont mauvaises pour les acteurs de ce jeu : il ne s’agit pas là d’une logique constructive et attractive. Elles sont évidemment négatives pour « Besoin de gauche ».
Que faire maintenant ? Pour ma part, je m’en suis tenu, à la lettre, au mandat qui m’avait été confié : une première étape a été franchie avec la « Ligne claire ». Je me réjouis de ce rassemblement, qui renforce notre assise, se fait sur la base de principes partagés et dans la cohérence, et qui s’est opéré dans la transparence. Je reste déterminé à aller jusqu’au bout de ce mandat, et à conduire la discussion avec Martine Aubry et avec le « Pôle écologique » à partir des décisions que nous avons arrêtées en commun. Revenir aux principes définis ensemble, défendre les thèses de notre contribution, mettre en œuvre les termes du contrat passé : telles sont les conditions pour peser et faire avancer nos propositions, que je crois toujours justes, pour répondre au besoin de gauche que nous ressentons, pour le faire dans l’unité. C’est ainsi que je conçois la politique : dans le respect du vote des militants, dans la cohérence, avec une exigence de vérité.
Permets-moi de te donner, pour terminer un sentiment personnel. Je suis de plus en plus inquiet de la tournure prise par ce Congrès. Les logiques mises en œuvre, ici et là -car d’autres ont bien sûr leur part de responsabilité dans la dégradation du climat dans le Parti- nous mènent à une confrontation qui, si rien n’était fait, désespérerait ceux qui attendent de la gauche une perspective d’alternance et de changement. Nous devons absolument préparer une autre gouvernance au PS, une alternative à la présidentialisation du Parti, chercher, inlassablement, un rassemblement large, réformiste, ancré à gauche. C’est pourquoi je suis, plus que jamais, résolu à militer, à partir de nos idées, pour la remise au travail du Parti, pour son ressaisissement collectif, conduit par une équipe de direction renouvelée, rajeunie, soudée, avec à sa tête un Premier secrétaire dévoué à la tâche essentielle de rénovation qui nous attend, pour l’emporter en 2012.
Tu peux compter sur mon dévouement, je compte sur ta confiance.
Avec ma fidèle amitié,
Pierre Moscovici
Cher(e) Camarade,
J’ai préféré attendre que l’émotion née de l’échec de l’Université d’été de La Rochelle soit retombée pour te faire part de mon analyse et de ma pleine détermination. Tout, pourtant, concourait à faire de ce rendez-vous une réussite, pour le Parti comme pour « Besoin de gauche ». La participation était nombreuse, les ateliers de qualité, la volonté de travailler des militants et leur aspiration à l’unité patentes. Vendredi soir, notre réunion de contribution fut un moment fort. 500 amis, rassemblés dans une salle surchauffée, ont accepté avec enthousiasme, pour l’immense majorité d’entre eux, et en tout cas à l’unanimité les propositions que je leur ai faites, en tant que premier signataire et après une intense concertation préalable.
Ces décisions étaient claires, et ne laissaient place à aucune interprétation divergente possible : volonté d’aller vers une motion réformiste, refusant la présidentialisation du Parti, exigeant des primaires ouvertes, soutien à ma candidature au poste de Premier secrétaire, dont je n’ai pas fait un préalable -c’est l’élégance et la sagesse- mais que j’ai présentée avec une totale fermeté. Il était convenu de proposer cette démarche aux amis de Martine Aubry et à la « Ligne claire » réunie autour de Gérard Collomb et Jean-Noël Guérini, ainsi qu’au « Pôle écologique », sans ostracisme mais sans contacts privilégiés avec Laurent Fabius, dont nous considérions qu’il ne pouvait être au cœur du renouveau nécessaire du Parti. J’ai reçu l’appui de tous, notamment celui d’Arnaud Montebourg et de Jean-Christophe Cambadélis, qui m’a promis un « contrat exclusif jusqu’en 2011 ». Vendredi soir, nous pouvions être fiers de notre force affirmée et de notre cohérence retrouvée, nous étions en situation d’être le pivot d’un pôle de rassemblement puissant, à vocation majoritaire.
Le samedi fut pour le Parti et pour nous un jour de tristesse. Car les images de cette journée furent exactement à l’opposé de nos décisions : réunion matinale de certains d’entre nous avec Laurent Fabius, Martine Aubry, Benoît Hamon, avec la perspective d’un courant de la « gauche décomplexée », déjeuner fort médiatisé avec les mêmes, sans Hamon. Je précise au passage, et de la façon la plus formelle, que je n’ai pas été invité à ces agapes auxquelles au demeurant, comptable d’une autre logique, la nôtre, je ne me serais pas rendu. Arnaud Montebourg, quant à lui, a vu sa bonne foi trompée, et a rétabli les faits dans un communiqué. Il ne s’agissait évidemment pas d’un malheureux concours de circonstance, ou d’aller expliquer aux amis de Laurent Fabius qu’ils n’étaient pas au centre de notre approche, mais de la poursuite organisée, méthodique, d’une démarche entreprise depuis des mois et inlassablement poursuivie. Je ne discute pas le droit de quiconque de penser que les décisions de notre réunion de la veille n’étaient pas les bonnes, mais alors, il eût fallu proposer une alternative à la contribution, qui aurait tranché par un vote. Par souci de l’unité, nous avions sagement et collectivement choisi de l’éviter, il fallait s’en tenir à cette attitude. L’image de tout cela est terrible : tractations complexes, alliances peu lisibles, non respect du vote des militants. Elles ne sont pas bonnes pour le PS, présenté sous son jour le plus sombre, loin des préoccupations des Français. Elles sont mauvaises pour les acteurs de ce jeu : il ne s’agit pas là d’une logique constructive et attractive. Elles sont évidemment négatives pour « Besoin de gauche ».
Que faire maintenant ? Pour ma part, je m’en suis tenu, à la lettre, au mandat qui m’avait été confié : une première étape a été franchie avec la « Ligne claire ». Je me réjouis de ce rassemblement, qui renforce notre assise, se fait sur la base de principes partagés et dans la cohérence, et qui s’est opéré dans la transparence. Je reste déterminé à aller jusqu’au bout de ce mandat, et à conduire la discussion avec Martine Aubry et avec le « Pôle écologique » à partir des décisions que nous avons arrêtées en commun. Revenir aux principes définis ensemble, défendre les thèses de notre contribution, mettre en œuvre les termes du contrat passé : telles sont les conditions pour peser et faire avancer nos propositions, que je crois toujours justes, pour répondre au besoin de gauche que nous ressentons, pour le faire dans l’unité. C’est ainsi que je conçois la politique : dans le respect du vote des militants, dans la cohérence, avec une exigence de vérité.
Permets-moi de te donner, pour terminer un sentiment personnel. Je suis de plus en plus inquiet de la tournure prise par ce Congrès. Les logiques mises en œuvre, ici et là -car d’autres ont bien sûr leur part de responsabilité dans la dégradation du climat dans le Parti- nous mènent à une confrontation qui, si rien n’était fait, désespérerait ceux qui attendent de la gauche une perspective d’alternance et de changement. Nous devons absolument préparer une autre gouvernance au PS, une alternative à la présidentialisation du Parti, chercher, inlassablement, un rassemblement large, réformiste, ancré à gauche. C’est pourquoi je suis, plus que jamais, résolu à militer, à partir de nos idées, pour la remise au travail du Parti, pour son ressaisissement collectif, conduit par une équipe de direction renouvelée, rajeunie, soudée, avec à sa tête un Premier secrétaire dévoué à la tâche essentielle de rénovation qui nous attend, pour l’emporter en 2012.
Tu peux compter sur mon dévouement, je compte sur ta confiance.
Avec ma fidèle amitié,
Pierre Moscovici
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