mercredi 19 novembre 2008

Qu'est ce qui se cache derrière la photo ?

Christophe Schimmel / AFP
Cette photo aura marqué toute une génération. Pour ceux qui ne sont pas de cette époque, le café radical fait un petit rappel historique.
Ca se passe à Billancourt devant les usines Renault le 25 février 1972.
Un jeune homme participe à la distribution de tracts devant l'entreprise qui représente un objectif stratégique pour le groupuscule virulent auquel il appartient : la gauche prolétarienne.
Très rapidement, le défi dégénère entre gardien de l'entreprise et le militant gauchiste.
L'enjeu : quelques mètres carrés, un territoire de distribution situé en deça ou en delà des grilles de l'entreprise ... comme à chaque distribution depuis des mois.
Le jeune homme s'avance avec une barre de fer. Le vigile sort une arme.
Il s'agit de Pierre Overnay et de Jean Antoine Tramoni.
Pierre Overnay : tu n'oseras pas ...
Jean Tramoni ose ...
Le bilan est lourd : un mort
Le bilan est lourd : le mouvement gauchiste tient là la preuve absolue de la malignité du système.
L'émotion individuelle se transforme en émotion sociale et politique
500.000 personnes défilent aux côtés de l'extrême gauche. Jamais, 4 ans après mai 68, le gauchisme ne s'est senti aussi fort.
C'est son crépuscule flamboyant. Quelques mois après, il entre dans la nuit. La Gauche Prolétarienne (le mouvement auquel apartenait Pierre Overnay) s'auto dissout.
Un autre drame se produit côté trotskyste (Pierre Overnay était Maoïste), l'autre versant du gauchisme, c'est la mort de Michel Recanati[1] magnifiquement raconté dans le film de Romain Goupil : mourir à 30 ans.
La jeunesse s'éloigne du gauchisme militant et celui-ci trouve son exutoire dans la participation électorale qu'il exécrait.
Tous ceux qui se sont avec passion attachés à la Révolution réalisent qu’ils ne feront pas l’Histoire et chacun est à la recherche de compromis avec ce monde qui représentait le mal absolu.
C’est le drame de l’adolescence poussé à son paroxysme.
Nombreuses dépressions, nombreux suicides, parcours cahotiques pour de nombreux militants à la pointe d’une génération et qui ont souvent été abandonnés par des leaders qui les avaient embarqués.
L’histoire de Christophe Schimmel est à cet égard emblématique. C’est lui qui, à 18 ans à l'époque, photographie la scène.
Il était là pour apporter des témoignages photo de l’action révolutionnaire. Sa photo a été reprise par toutes les agences de presse. Elle ne lui a jamais rapporté un rond !

Libération donne un témoignage émouvant de ce militant, qui se raconte après plusieurs tentatives de suicides et une vie cahotique. Il raconte que 15 des 35 personnes qu’il a recruté dans sa mouvance sont mort de mort violente (suicide, overdose etc), bien avant l’âge comme on dit.
http://www.liberation.fr/politiques/0101266917-tombes-pour-les-maos




[1] Il faut voir le film de Romain Goupil, alors tout juste remis de ses années de militantisme au Front Communiste Révolutionnaire. Michel Recanati, dirigeant du parti était chargé du service d’ordre et avait réussi l’exploit de tenir le terrain face à l’extrême droite et surtout face à la police lors d’une manifestation emblématique. Un summum d’organisation qui a valu l’admiration militante et la dissolution de son parti devenu à la suite Ligue Communiste Révolutionnaire, le parti de Besancenot. Dans une logique toute bolchévique, Michel Recanati, est exclus de la direction pour dérive militaire. Il entre alors dans une profonde dépression qui se traduira par un suicide.

1 commentaire:

WOTAN a dit…

Bravo pour ce reportage de Libe cela me ramene 36 ans en arriere...courage pour ce photographe qui est un oublie de l'histoire comme beaucoup d'autres.