lundi 21 juin 2010

Anelka président !

Un déluge d’obscénité…

Si Anelka avait dit « Casse-toi pauv’con » à Domenech, il serait président de la République »…

Oui, on peut s’indigner du comportement des Bleus, du fait qu’ils doivent servir de modèle à nos jeunes … On peut, on peut, on peut.

On peut aussi rester simple. Dire qu’on aurait bien aimé que la France gagne… Qu’elle n’a pas gagné, que l’équipe était moins bonne… Rappeler aussi que football n’est qu’un jeu, que c’est un bonheur de voir toute une nation derrière son équipe qui gagne, même si dans toute victoire il y a une part de hasard, de chance… N’oublions pas les concours de circonstances qui ont fait de la France la championne du monde 1998 ! Mais parfois la France perd… ça rend de mauvaise humeur, des grossièretés sont dites… mais la pire grossièreté vient bien sur des médias qui engagent tout un chacun à relayer la grossièreté qu’elle vienne des commentateurs, des ministres, des journalistes, des piliers de télé, qui refont le match jusqu’à la nausée…

Le ridicule de la défaite, on s’en remettra… L’échec de l’équipe, des joueurs, de l’entraîneur aussi … Mais ce qui est affligeant c’est effectivement le ridicule dans lequel se plonge l’ensemble des commentateurs… On n’en avait pas entendu tant lorsque Zinedine Zidane avait infligé un coup de boule lors de la finale du mondial… et qui était un autrement mauvais exemple pour la jeunesse avant d’être publiquement félicité par le président de la République de l’époque…

Ainsi donc, la grossièreté d’Anelka a laissé la place à la vulgarité des ministres qui transforment ça en affaire d’État … à la vulgarité des commentateurs politiques qui se refusent à mettre l’affaire à sa juste place (signalons toutefois la juste réaction de François Bayrou sur ce point).

Mais le pire est venu d’Alain Finkielkraut(en photo là haut), qui reprend la posture obscène qui lui avait fait parler en 2005, de l’équipe « black, black, black » dans une interview au journal Haaretz[1],. Par la suite, il s’était offusqué que des Français puissent vibrer lors de la qualification de l’équipe d’Algérie. Samedi soir sur Europe 1, il a déclaré on a plutôt envie de vomir avec la génération caillera, il est temps de ne plus sélectionner des voyous arrogants et inintelligents et de sélectionner des gentlemen. Il faut prendre acte des divisions ethniques et religieuses qui minent cette équipe. L’équipe de France est une bande de voyous.

Comme dit Pascal Boniface, a qui j’emprunte une partie des propos : « si le comportement des joueurs de l’équipe de France est condamnable, les propos du philosophe le sont également. Il ne critique pas les joueurs pour ce qu’ils FONT, mais pour ce qu’ils SONT : des jeunes issus de la diversité et des banlieues.

Si Le Pen avait tenu de tels propos, on peut penser que les journalistes l’auraient contredit. Mais là non, on ne contredit pas le philosophe, au contraire, on lui permet de répéter son message dans le JDD et ce matin dans France Inter.

Il y a finalement une logique dans la pensée de Finkielkraut. Les Noirs et les Arabes sont des voyous, les joueurs de l’équipe de France sont principalement des Noirs qui viennent des banlieues ; ils sont donc des voyous. S’il y a certainement dans l’équipe des joueurs dont les valeurs morales sont critiquables, peut-on dire que l’on peut mettre les 23 dans le même sac ? Peut-on expliquer la débâcle actuelle par les divisions ethniques et religieuses ?

Une fois encore, Alain Finkielkraut semble obsédé par la question ethnique ou religieuse à laquelle il ramène tout. Le problème est un problème d’individu ou de groupe, pas un problème de religion ou d’origine ethnique. Faut-il ne sélectionner que des joueurs de la même origine, en faire une équipe ethniquement homogène ? Faut-il rappeler à Alain Finkielkraut, chantre de l’homogénéité, que même l’équipe d’Israël est diverse puisqu’il y a des Arabes qui en font partie ?

Faut-il exiger des joueurs qu’ils puissent employer l’imparfait du subjonctif avant de porter le maillot bleu ? Doit-on procéder à la sélection à partir du classement de l’ENA ou d’un tirage au sort dans le bottin mondain ? Alain Finkielkraut a publié récemment Un Cœur intelligent ; il a un cerveau purement émotionnel dès qu’il s’agit de foot. Il lui reste à supporter l’équipe de Nouvelle-Zélande. On en appelle en effet les joueurs les « All Whites ». »

Je me permets de rajouter une chose… Le football est un sport éminemment populaire, qui a parfois été pratiqué par des gentlemen, mais pas seulement.

Finkielkraut en revient à la vision aristocratique d’un sport amateur, réservé à une élite. Nous n’en sommes heureusement plus là.

Parfois nos héros, ont leurs humeurs, parfois ils perdent et ils n’aiment pas ça… et ils ont un mauvais comportement… Parfois nos héros perdent… et nous n’aimons pas ça… Nous avons un mauvais comportement…

Sachons nous ressaisir.

Jeudi, un autre combat s’annonce. Il faudra se battre pour que la France continue de donner l’exemple au monde en matière de droit social. C’est un tout autre enjeu ! Qu'on m'accorde d'y apporter beaucoup plus d'importance que les généralisations abusives issues d'une défaite qui n'a provoqué d'autres blessures que narcissiques et financières.

Battons-nous pour une retraite juste !



[1] Il avait par la suite affirmé qu’il avait été mal compris, mais les journalistes d’Haaretz avaient répondu qu’ils tenaient à disposition l’enregistrement de la conversation, et Alain Finkielkraut n’avait pas demandé à ce qu’il soit rendu public.




4 commentaires:

Anonyme a dit…

dommage que tout se passe de cette façon
Et pour ce qui est des ethnies, la France affiche sa diversité !Ils ont une carte d'identité française, non ?

Sylvia Mackert

et je souris, car le mot de passe cette fois est "medise", tout à fait en accord avec le sujet...

Café radical a dit…

dommage, sans doute... et c'est aussi tout l'intérêt du jeu : apprendre à vivre ensemble. La réaction de Finkielkraut effectivement n'apprend pas à vivre ensemble... Cela appuie ce que disait Pascal Boniface à un autre moment de son article : Finkielkraut n'aime pas le football... on comprend pourquoi

Anonyme a dit…

Oui, c'est malheureux qu'il y ait des personnes qui raisonnent de la sorte. Le sport est sensé rassembler et être le modèle de solidarité (jeu en équipe) et de partage.
Mais les joueurs ne sont que des êtres humains et pas parfaits, il faut arrêter de les mettre sur un piédestal et les associer à des dieux du foot, donc ici, on voit, qu'ils restent humains et qu'ils peuvent craquer comme n'importe qui d'autre dans ce monde.
Et ceux qui sont racistes dans le sport, le sont aussi dans la vie et là on n'y peut pas grand-chose d'autre, qu'espérer qu'un jour ils changeront d'avis.

Sylvia Mackert

Essevaz-Roulet a dit…

Alain Finkelkraut a effectivement tenu sur France Inter des propos qui m'ont choqué.