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lundi 15 avril 2013

Davezies parle aux territoires ...

 Nous en avions déjà parlé lors de la sortie remarquée de son ouvrage "La crise qui vient". En fait, Laurent Davezies s'amuse lui-même du titre, dramatisant, catastrophiste, dont il n'est pas à l'origine. Le sens du titre n'évoque pas une crise à venir, mais l'évolution de la crise qui est là, depuis 2008, et qui frappe diversement les territoires. La crise qui vient, c'est donc la crise telle qu'elle évolue, telle qu'elle nous touche et nous touchera, plutôt qu'une crise qui sera encore plus terrible que ce qu'elle est actuellement.
Je vous propose d'écouter la conférence que Laurent Davezies a faite devant les cadres territoriaux en formation à Strasbourg, en cliquant  . 
L'auteur  en livre un peu plus sur l'état de sa réflexion qui touche sur la répartition des richesses entre territoires, les conséquences sur la vie des habitants, la mobilité de ceux-ci (eh oui !... parce qu'ils peuvent partir les habitants, et dans le cadre d'un territoire en crise, la débauche de moyens pour les faire rester n'est pas obligatoirement intéressante).

Laurent Davezies, économiste avant d'être démographe, insiste sur le fait de l'évolution de l'emploi féminin depuis la fin de la deuxième guerre mondiale qui s'est développé sur le marché de l'emploi non qualifié, un marché où la main d'œuvre masculine a marqué un recul considérable, aboutissant lors des crises de l'emploi à un bouleversement complet des valeurs. Laurent Davezies, qui en parle dans son livre, mais pas dans la conférence ci-dessous, fait d'ailleurs un lien entre ce phénomène et la montée du front national, lorsque les hommes, référent social par excellence, se retrouve relégué à l'inutilité et à l'isolement dans un territoire en crise. Mais ce qui se passe à l'intérieur des territoires, n'est qu'une conséquence de la manière dont on considère les territoires en fonction d'une politique Nationale.
Ainsi est il question y parle des indépendantismes, forcément, qui titillent les régions riches, on y parle de la Corse, et de la réaction de Chevènement à la suite de l'assassinat du Préfet Erignac : combien coûte la corse ? 
Réaction étonnante de la part de Chevènement, amoureux de la Nation tel qu'on le connaît ... car une Région qui coûte aujourd'hui peut être une Région qui rapporte demain, et qu'à tout prendre, la solidarité est une part majeure de la force des Nations.
La volonté pour les régions riches de s'affranchir ne date pas d'hier et n'est pas propre à la France. De l'anecdotique Baltimore, au Nord du Mexique, en passant par les basques espagnols, les leghistes italiens d'Umberto Bossi, et les écossais voulant profiter de la manne pétrolière (mais qui risquent d'être indépendant quand le sous-sol en sera vidé) notre monde fourmille d'exemples de velléités politiques s'appuyant sur une prétendue rationalité économique.
Pourtant, en France, les contre-exemples sont nombreux ...Si l'on avait laissé tomber la Bretagne à l'aube des années 60 pour cause de non rentabilité économique, on ne connaitrait certes pas le problème de l'aéroport de Notre Dame des Landes, mais la France serait privé de l'un de ses principaux moteurs économiques. De même, le Nord pas de Calais est aujourd'hui un territoire sous perfusion ... alors qu'il était la ressource majeure de l'économie Française d'après-guerre.
Car les territoires bougent. et quoi qu'il en coûte, le rôle de la politique est bien de leur permettre d'exister. A ce sujet, Laurent Davezies explique pourquoi il s'oppose à la notion de compétitivité des territoires qui posent une fausse problématique. La solidarité y est indispensable. Les élus défendent leurs territoires, et, comme dit Laurent Davezies, les élus se battent toujours pour ce pour quoi ils ont été élus. Or, la politique efficace n'est pas toujours dans la compétitivité des territoires lorsque ceux-ci sont en perte de vitesse.
Bref, une conférence passionnante, mais qui prendra quand même 2 heures de votre temps... 
A noter aussi un piège soulevé par Laurent Davezies et qui concerne l'impact de l'emploi public dans les territoires. Tout en rappelant que le prix du service est forcément plus lourd dans les territoires ruraux, en fonction des coûts incompressibles (une classe est plus chère dans le Cantal qu'en Seine-Saint-Denis, par exemple), il souligne que les statistiques de l'Insee raisonnent en terme d'emplois publics plus qu'en terme de service. Le service de l'eau, par exemple, sera considéré comme un service public s'il est en régie, alors qu'il sera celui d'une entreprise privée en cas de délégation de service public, quand bien même le service rendu est le même.  
Deux points enfin sont évoqués par Laurent Davezies, l'un touchant au cumul des mandats et l'autre aux pôles métropolitains.
En suivant la logique de son axiome "les élus se battent d'abord sur ce sur quoi il sont élus", Laurent Davezies situe bien la limite du cumul des mandats qui figent le regard de l'élu en fonction du territoire qu'il représente. le cumul a au moins cet avantage d'offrir une autre perspective à l'élu, selon qu'il est maire ou conseiller régional ou général ou représentant de la Nation.
Un autre exemple : celui du pôle métropolitain et de son mode de représentation anti-démocratique. Par nature, l'élu aura naturellement tendance à défendre le territoire qu'il représente rendant inutile, voire nuisible sa réflexion dans le cadre d'une vision supra territoriale.
Amusante perspective qui a effectivement nourri le débat des représentations à la Case, où Franck Martin avait refusé que le maire de Val de Reuil, en ce qu'il se montrait incapable de représenter autre chose que les intérêts de sa commune.
tout ceci montre la complexité et la difficulté du système de représentation à la Française qu'il convient de réformer d'urgence. Las, le recul gouvernemental en la matière est patent. Les lobbies représentant les élus locaux ont encore eu gain de cause en faisant morceler le projet de réforme si nécessaire. On se limite dans un premier temps aux Métropoles, c'est à dire à ce qui ne satisfait que quelques urgences locales (Lyon, Nice et Rouen) ... mais la nouvelle redéfinition des communes et des intercommunalités, qui sont le nœud du problème, attendront ... Jusqu'à quand ?

dimanche 11 novembre 2012

Crise et fracture territoriale

Davezies un matin sur France inter.... ça réveille !a

L'approche de Laurent Davezies 
appliqué à la Case

C'est pourtant vrai. Bien qu'elle soit au cœur de l'actualité depuis plus de 4 ans, la crise économique a rarement été traitée sous l'angle de ses conséquences sur les territoires. 
Laurent Davezies a créé la sensation il y a une quinzaine de jours sur France Inter, où il était appelé à commenter son bouquin : la crise qui vient, la nouvelle fracture territoriale
Laurent Davezies est un chercheur expérimenté en économie, professeur au Cnam. Il travaille sur les chiffres fournis par l'Insee et s'appuie sur des données de bases qui permettent d'évaluer d'où l'on vient, où l'on risque d'aller et de se débarrasser des idées aussi fausses que nombreuses qui accompagnent la situation économique que nous vivons.

Des chiffres et des lettres, sur 120 pages,
mais un message assez clair : les territoires
doivent s'adapter.
Au delà de la vision que nous pouvons avoir de la crise et de ses impacts locaux, il convient aussi, égoïstement  de déterminer l'impact que celle-ci peut avoir sur notre territoire et ses conséquences sur l'action géopolitique. Ainsi, nous déterminerons si la politique de développement économique était adaptée à la situation et comment celle-ci peut être infléchie en fonction des perspectives.
1ère réalité, la France, jusqu'ici, a assez bien résisté à la crise. Bien sur c'est un message insupportable pour ses victimes mais deux raisons essentielles ont empêché que ses ravages ne s'étendent. 
La première est que la crise a été moins forte en France qu'ailleurs, la France n'étant pas entrée en récession. depuis 2008, bien qu'ayant un taux de croissance insuffisant pour enrayer le chômage, et notamment le chômage industriel. 
La seconde est que l'organisation de la société française a empêché que la crise ne renforce les différences entre les territoires. 
Le problème est que cette situation ne peut pas durer dans le cadre d'une crise durable. Ainsi, la crise de la dette, élément finalement assez nouveau dans l'économie mondiale, mettra forcément à mal le modèle français qui permet à l'ensemble du territoire national de bénéficier de l'activité économique de la région parisienne et des grandes métropoles ... mais surtout de la région parisienne qui fait qu'un francilien va y travailler toute sa vie, voire ses impôts répartis nationalement sur l'ensemble des régions, et va passer sa retraite en Corrèze.
On le sait, enfin, presque tout le monde le sait, même si certains, à l'extrême gauche notamment font semblant de na pas le savoir, le problème, quand on est endetté c'est que l'endettement ne sert plus à lancer de nouvelles activités, créatrices de richesses qui permettront un équilibre financier subséquent. Cela n'est plus possible avec une croissance à 1 %. 
Les conséquences en sont nombreuses et les conséquences sur les territoires sont nombreuses. Pour Davezies, il y a des territoires sacrifiés sur le plan industriel, mais ces sacrifices sont compensés par le service public dans les territoires. Certes, les territoires sacrifiés connaissent des conséquences qui agissent sur la structure même des foyers, se traduisant notamment par la chute de l'emploi industriel masculin. Il remarque que la conséquence politique se traduit par une montée du Front National dans ces territoires. 
En fait, pour Davezies, la compensation des emplois perdus, ne peut se faire en dehors de territoires intégrés, capables de produire répondant aux nouvelles exigences industrielles. 
Pour l'instant, certains territoires s'en sont tirés grâce à l'emploi public, proportionnellement plus développé dans les territoires en perte de vitesse qui sont toutefois à même de s'en tirer s'il bénéficient d'un attrait en raison de leur paysage ... tel n'est pas le cas de toutes les régions françaises, même si un peu partout s'est développé une valorisation du tourisme de proximité et du patrimoine. Ainsi, l'emploi public va avoir tendance à se raréfier et un vrai choix politique devra se faire entre la poursuite d'une solidarité entre les territoires basée sur le principe d'égalité, et la nécessité de valoriser la réussite de certains territoires. 
Bien, me direz-vous ... et concrètement ? 
Concrètement, je vous propose d'appliquer sur notre territoire Seine-Eure en voie d'élargissement les préceptes de Laurent Davezies
La politique de notre territoire a constitué à mettre en valeur nos atouts, tant sur le plan de son attrait patrimonial et touristique que sur le plan des relations avec les territoires voisins et notamment la Métropole et de s'inscrire dans le projet du Grand Paris. Effectivement, le dynamisme du territoire, ne peut s'exercer sans lien avec la métropole voisine, d'où l'intérêt de la création récente du pôle métropolitain, et du développement des liaisons avec le pôle universitaire. Il convient donc de tout faire pour densifier les échanges, d'où l'importance des infrastructures qui nous relient au grand Paris ou à la métropole tels que le contournement-est de Rouen ou la plate-forme tri-modale. 
Inauguration de l'école de musique à Louviers. La valorisation du
patrimoine, parce qu'elle donne du bonheur aux habitants, a aussi une
fonction économique en renforçant l'identité d'un territoire directement
concerné par l'axe Seine et le grand Paris et la proximité de Rouen. 
A ce titre, il est important de souligner que les revendications d'un emploi sans défendre ni ces infrastructures ni les diversifications de l'emploi sont parfaitement incohérentes, voire parfaitement réactionnaires, s'appuyant sur une vision dépassée du développement économique. Le travail des autorités publiques consiste effectivement à veiller, comme le rappelle sans arrêt Franck Martin, le président de l'agglomération, à ce que les infrastructures soient des outils pour un lien renforcé avec la métropole rouennaise et le grand Paris afin de profiter des atouts métropolitains tout en étant capable d'offrir un cadre de vie que les grands métropoles ne sont pas capables d'offrir. 
On ne m'en voudra pas d'avoir synthétisé à l'excès un ouvrage chiffré et référencé, et surtout de l'avoir appliqué à la situation très particulière de notre territoire. Ce qui saute aux yeux, à la réflexion, est tout l'intérêt, en dehors du travail sur les infrastructures, de valoriser notre patrimoine, ce que la restauration du cloître des Pénitents, avec en son sein l'école de musique a magnifiquement illustré. 
Fort d'une identité historique puissante, situé sur les grands axes de développement, jouxtant une grande métropole et situé sur l'axe du Grand Paris, notre territoire bénéficie des meilleurs atouts. Cela peut se mesurer aisément à la lecture de ce qui différencie un secteur en difficulté d'un secteur d'avenir. S'inscrire en dehors de cette situation géopolitique serait suicidaire.