mercredi 6 juin 2012

La mise à mort du dragon ?

Je ne sais pas pourquoi, quand j'ai appris qu'une manifestation était organisée à Andé pour protester contre la venue de Jean-Marie Le Pen, j'ai pensé à "La mise à mort du dragon"une nouvelle de Dino Buzzati : 
Dino Buzzati y raconte l'histoire d'une légende urbaine qui révèle qu'un dragon se cache dans la vallée de la Région Secca.
En fait, ce dragon ne dérange personne, mais l'aristocrate du coin, le Comte Gérol, décide tout d'un coup d'aller le pourfendre. Il emmène derrière lui tous ses gens, et une bonne partie du village. Une fois qu'il le trouve, on assiste à l'assassinat pathétique d'un petit dragon malade incapable de se défendre, qui se permet juste de hurler pour protéger sa progéniture... Et l'on comprend très vite que toute demande d'intelligence n'aura aucun pouvoir face à l'entêtement du baron à vouloir jouer au héros, persuadé d'être la représentation du bien face à la personnalisation du mal. (la nouvelle fait partie du recueil Panique à la Scala)
Alors, c'est ça la bête immonde qu'il faut combattre pour se
faire un peu de publicité ?  
Bien sur, il faut comparer ce qui est comparable ... et le père de Marine Le Pen ne m'inspire aucune sympathie, et en plus l'intention des manifestants n'étaient pas de l'assassiner. Et d'ailleurs, à la limite, c'est presque pire.
Mais, plus sérieusement, quel est le problème ? Est-ce que c'est vraiment, au milieu d'un terrain vague à Andé, en manifestant contre le vieillard emblématique d'un espace politique dépassé, en manifestant contre celui dont la fille elle-même cherche à se débarrasser, est-ce ainsi qu'on va combattre le nouveau populisme ? Laissons pour l'instant l'UMP s'acharner à démontrer qu'ils défendent un projet différent du Front National. (Pour une analyse plus fine de ce qui s'est passé lors des présidentielles, se reporter au texte publié par Fondation Jean Jaurès) Pour notre part, nous pensons que c'est en se donnant les moyens d'un parti au pouvoir que l'on peut agir en profondeur contre ce qui provoque le vote Front National plutôt que de provoquer vainement leurs militants.
Bien sûr, même en politique, on peut avoir besoin d'héroïsme ! Les révolté syriens, les Egyptiens nous en font la démonstration chaque jour ....
Mais ce n'est pas en manifestant contre le vieux cacochyme qu'on arrivera à convaincre le quart de la population du département qui a voté Marine Le Pen.
Dès maintenant, des responsabilités nouvelles nous attendent. Le Front National ne doit pas constituer l'alpha et l'omega de l'action politique de la gauche. Ce serait le pire signal à envoyer à la population... et surtout à celle qui a voté pour Marine le Pen.
La situation demande de l'action, de la communication et du dialogue. C'est bien autre chose que des incantations ou de l'héroïsme de cour de récréation.
Disons le franchement, ce type d'initiative, qui place le Parti Socialiste et la gauche sous l'influence de Mélenchon, lui-même vivant dans la nostalgie gauchiste post-soixante-huitarde n'a aucun sens politique (voir  ce que j'ai écrit à ce sujet ... ici même) . Quel est l'intérêt de distribuer des tract en pleine campagne à une poignée de militants abrutis ?

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