Une fois passée les premières émotions : ni rire, ni pleurer, mais comprendre avant de combattre. |
Dans une élection, tout le monde parle à voix basse, même ceux qui se taisent. Mais, comme il y a beaucoup de monde, ça fait beaucoup de bruit... en fait, dans le résultat des élections, c'est toujours un pays qui parle.
Les élections européennes sont un moment particulier dans cette prise de parole, même si elles engrangent beaucoup
d'abstention. Mais après tout, ce n'était pas tellement le cas
cette fois-ci (il y a même eu un léger mieux par rapport à la dernière
fois) !
Elles sont un scrutin à part. C'est la seule fois où l'électeur n'a qu'un seul tour. Tout le monde part en même temps. Tout le monde arrive en même temps. Certes le choix de découper la France en grande circonscriptions[i]
fausse un peu la donne, mais on peut estimer avoir une bonne idée de ce qui se passe dans la tête du peuple de France.
C'est bien pourquoi, tout déni est impossible après une élection. Il existe bien, à chaque fois un message. Même si chaque électeur ne porte que sa propre voix, c'est l'ensemble des voix qui crée un chant harmonieux, un brouhaha désagréable ou un tumulte insupportable.
Et les Européennes, ça a été ça ! Le tumulte. Le tumulte des résultats, suivi du tumulte des analyses. Un vent de culpabilisation réciproque. si les gens ont voté front national, c'est de la faute des autres, soit qu'ils aient trop parlé du front national, soit qu'ils l'aient ignoré, soit qu'ils l'aient diabolisé, soit qu'ils l'aient normalisé.
Et de fait, le Front national a été ainsi traite, tour à tour pendant trente ans. Je me souviens de l'effroi que j'avais éprouvé en voyant le parti de Le Pen obtenir 10 % aux élections européennes ... en 1984, alors que Le Pen lui-même n'avait pu se présenter à la présidentielle de 1981 et réalisé 0,75 % des voix en 1974.
C'est bien pourquoi, tout déni est impossible après une élection. Il existe bien, à chaque fois un message. Même si chaque électeur ne porte que sa propre voix, c'est l'ensemble des voix qui crée un chant harmonieux, un brouhaha désagréable ou un tumulte insupportable.
Et les Européennes, ça a été ça ! Le tumulte. Le tumulte des résultats, suivi du tumulte des analyses. Un vent de culpabilisation réciproque. si les gens ont voté front national, c'est de la faute des autres, soit qu'ils aient trop parlé du front national, soit qu'ils l'aient ignoré, soit qu'ils l'aient diabolisé, soit qu'ils l'aient normalisé.
Et de fait, le Front national a été ainsi traite, tour à tour pendant trente ans. Je me souviens de l'effroi que j'avais éprouvé en voyant le parti de Le Pen obtenir 10 % aux élections européennes ... en 1984, alors que Le Pen lui-même n'avait pu se présenter à la présidentielle de 1981 et réalisé 0,75 % des voix en 1974.
Hervé Le Bras, démographe. Son l'analyse géo-politique est impatiemment attendue des spécialistes après chaque élection |
Comme beaucoup, j'attends toujours avec impatience l'analyse qu'Hervé Le Bras publie régulièrement dans Libération (vous pouvez cliquer sur le lien, mais manque de pot, c'est réservé aux abonnés... dommage !) après chaque scrutin électoral. Il y a là toujours quelque chose de rassurant après l'émotion des premiers moments, quand on cherche à savoir ce que disent les urnes ... après en avoir enregistré les résultats. La raison, après l'émotion.
L'invention de la France, co-écrit par Emmanuel Todd et Hervé Le Bras reste un ouvrage de référence pour comprendre l'évolution régionale de l'opinion française. |
Le problème est
qu'Hervé Le Bras n'est pas vraiment rassurant. Quand il parle d'une France
coupée en deux, ça n'a pas le même sens que d'habitude. Certes, le Fn n'a pas
progressé partout de la même manière[1].
Hervé Le Bras signale à juste titre que c'est dans les régions en mauvaise
santé économique que le FN a réalisé ses meilleurs résultats, confortant le
tournant politique de Marine Le Pen qui prône, au rebours de son père, le
retour de l'Etat et la dénonciation du libéralisme économique. Son électorat
est d'abord éloigné des grandes agglomérations, s'inquiète de l'absence des
institutions qu'il accuse de le délaisser.
De fait, le vote
massif pour le Front National traduit un rejet massif des élites. Plus les
élites sont éloignées, plus elles sont rejetées, mais les élites, comme le
rejet, commencent très bas. Ainsi (mais ce n'est pas ce que dit Hervé Le Bras)
le rejet touche bien sur les Enarques, traditionnel sujet de rejet, les
politiques, mais va jusqu’au plus bas niveau des institutions, tel
l'enseignement par exemple.
Cela fait
justement penser que la traduction française de la crise, laisse s'acheminer
chez l'individu, le sentiment que les autres auraient tout cependant qu'il n'a
rien. La perte de confiance, écrit Hervé Le Bras, qu'une population accorde à
son élite est lourde de menace pour l'avenir.
Alors, voilà. Moi qui, sur ce sujet comme sur tant d'autres, moi qui, comme beaucoup d'autres, me suis beaucoup trompé sur ce sujet en refusant de faire du front national l'alpha et l'omega de l'action politique, je peux vous annoncer la prochaine tenue d'un café radical sur le sujet.
Ca s'appellera sans doute : est-il possible de stopper le Front National. La date, le lieu et le nom de l'intervenant vous seront bientôt précisés.
[1] Signalons au passage que le score canon réalisé dans la
circonscription dénommée Nord-Ouest, et qui va de la Belgique à la Basse
Normandie est notamment dû à la présence de Marine Le Pen en personne comme
tête de liste face à des concurrents parfaitement inconnus ... effet pervers de
la limitation du cumul des mandats et du découpage de la France en
circonscriptions illisibles... sur ce point, la volonté conjointe des grands
partis structurants (enfin, qui l’étaient à l’époque) de marginaliser toute
voix discordante s’est avérée un échec patent.
Hervé Le Bras
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