Louis-Marie
MARTIN, lui aussi ex-prg et avec qui j’ai partagé quelques beaux moments, quelques bisbilles et des
divergences marquées m’a interpellé ainsi sur facebook « C'était il y
a quelques jours sur le mur de Diégo je crois, je posais la question qu'est ce
que vous entendez par "Gauche" quelles valeurs y mettez-vous ? Ce
serait sympa de répondre ».
Du coup, un peu énervé, façon Saint-Ex au Petit Prince, je lui ai répondu ça, tant l'exercice me semblait impossible: « Comminatoire[1] Louis-Marie ! Tu veux faire la
police façon bolcho... et toi qu’entends-tu comme valeur de gauche ? Qui
souhaites-tu exclure de ton champ ? »
Je
pensais ainsi avoir répondu non pas à la question de Louis-Marie, mais au
problème qu’il posait. J’ai réfléchi, et je me suis dit que non. D’où ma
décision de me lancer dans l’aventure et de tenter de répondre à la question de façon succincte, compréhensible, et réaliste. Bref, ce type de
défi qu’on se lance sans savoir si l’on a quelque chance de pouvoir relever. Après
tout, ce sera au lecteur de juger. Tant pis pour Louis-Marie, tant pis pour
moi.
1) à ta question :" qu'est ce que vous entendez par "Gauche" quelles valeurs y mettez-vous ? Ce serait sympa de répondre."... je ne répondrai pas.
Tout d’abord parce que je ne peux répondre qu’en mon nom propre, pas au nom du parti des Radicaux de gauche dont je m’honore de faire partie, et encore moins au nom de Diégo qui te répondra s’il le souhaite. Ainsi je ne réponds pas à la question « quelles valeurs y mettez-vous ? », « mais quelles valeurs y mets-tu ? »
Tout d’abord parce que je ne peux répondre qu’en mon nom propre, pas au nom du parti des Radicaux de gauche dont je m’honore de faire partie, et encore moins au nom de Diégo qui te répondra s’il le souhaite. Ainsi je ne réponds pas à la question « quelles valeurs y mettez-vous ? », « mais quelles valeurs y mets-tu ? »
La pensée radicale du philosophe Alain "personne ne peut penser à ta place" |
2) Comme tu le soulignes
toi-même par ailleurs, « il y a des gens qui placent
Macron à Gauche, donc de Macron au
NPA le champ est un peu large ». Je
m’enorgueillis d’avoir visité à peu près toutes les familles de la gauche, des
radicaux de gauche à l’ultra gauche[2] en passant par l'anarchisme, le trotskysme sans parler de sympathies diverses, voire, je le concède, de flirts essaimés au fil des ans. Je tire et j’ai toujours tiré une conclusion de
tout cela : je n’ai, je n’aurai jamais aucun rôle de police politique ou
de police des mœurs : pour être à gauche, il suffit de se sentir à gauche. Je reprends la formule d'Alain, le maître radical "personne ne peut penser à ta place". Je n’ai pas vocation à exclure telle ou telle personne de ce qu’on appelle la
gauche. Je sais qu’il y a des gens à gauche avec qui je ne m’allierais jamais
comme je sais aussi qu’il y a des gens à
droite avec qui je peux m’allier, mais c’est une autre histoire.
3)
J’ai organisé à
Evreux un banquet républicain sur le thème « le radicalisme est-il l’avenir
de la gauche ? ». Tu aurais dû venir, et tu aurais pu en débattre
avec nous, on était soixante. Conformément à notre démarche, le débat était ouvert à tous
et cette question est naturellement venue sur la table. Voilà la manière dont j’y
réponds sans vouloir engager qui que ce soit d’autres :
a.
La notion de
droite et de gauche est essentiellement républicaine. C’est la République qui a fondé ces
notions de droite et de gauche, en plaçant d’un côté de la nouvelle assemblée
ceux qui voulaient défendre le du droit de véto et de l’autre côté (à gauche) ceux qui refusaient
le pouvoir absolu du roi.
Ainsi
se sont retrouvés autour d’une question historique clivante
·
à droite ceux qui voulaient défendre une société de
privilèges
·
à gauche ceux qui défendaient les principes de liberté,
d’égalité et de fraternité au cœur d’une société du mouvement (même s'ils ne formulaient pas comme ça).
Depuis deux
siècles et demi, ces notions se sont universalisées et ont démontré leur pertinence
au travers des époques et des lieux. Elles ont encore leur sens, et c’est pourquoi,
lorsque la présidente, l’état major et le parti
radical de gauche auquel j’adhérais depuis vingt ans ont dit qu’ils étaient au centre,
je ne les ai pas suivis. Je ne suis pas le seul, et ceux qui ont refusé cette logique
ont créé un nouveau parti : Les Radicaux
de gauche.
Maintenant,
tu demandes, enfin, tu ne demandes pas, tu sous-entends : allez-vous
rejoindre Macron ? Je suis désolé de ne pouvoir te répondre qu’en mon nom
propre même si pour moi la question ne se pose pas comme ça.
D’abord, avant de savoir si l’on doit rejoindre tel ou telle, il faut définir notre projet. Nous nous y attelons, mais, très tranquillement, comme je dis "la première chose à faire est de nous retrouver entre bonnes volontés, voir ce sur quoi nous sommes d’accord, voir ce sur quoi nous ne sommes pas d’accord et voir si nous pouvons travailler ensemble. Les exemples de création d’un nouveau parti sont assez rares dans l’histoire pour que nous puissions prendre toute précaution au-delà de notre détermination
Ensuite, et je te livre là mon analyse, il serait parfaitement idiot de rejoindre le macronisme. Macron a bousculé le cocotier de la vie politique française et continue de le secouer. Il n’a aucun besoin d’une branche supplémentaire. Si c’est pour être Macronien ou macroniste, autant rejoindre « En Marche ». Je ne sais si cette démarche sera majoritaire parmi mes amis, mais je le suppose. Tout simplement parce que je n’ai rencontré personne jusqu’à présent qui désire soutenir la démarche du Président dela République même si
certains d’entre nous, dont moi, ne souhaitons pas entrer dans une démarche de
critique systématique, mais dans une attitude d’opposition attentive.
D’abord, avant de savoir si l’on doit rejoindre tel ou telle, il faut définir notre projet. Nous nous y attelons, mais, très tranquillement, comme je dis "la première chose à faire est de nous retrouver entre bonnes volontés, voir ce sur quoi nous sommes d’accord, voir ce sur quoi nous ne sommes pas d’accord et voir si nous pouvons travailler ensemble. Les exemples de création d’un nouveau parti sont assez rares dans l’histoire pour que nous puissions prendre toute précaution au-delà de notre détermination
Ensuite, et je te livre là mon analyse, il serait parfaitement idiot de rejoindre le macronisme. Macron a bousculé le cocotier de la vie politique française et continue de le secouer. Il n’a aucun besoin d’une branche supplémentaire. Si c’est pour être Macronien ou macroniste, autant rejoindre « En Marche ». Je ne sais si cette démarche sera majoritaire parmi mes amis, mais je le suppose. Tout simplement parce que je n’ai rencontré personne jusqu’à présent qui désire soutenir la démarche du Président de
6)
Macron rêve de naviguer entre deux pôles situés à l’extrême
gauche et à l’extrême droite qui lui garantiraient la survie et le confort
politique. Pour moi, c’est une utopie. La solution aux problèmes du monde ne se
résout pas à une question technique, où il faudrait laisser les experts décider
en dehors des réalités et aspirations sociales ou sociétales. La France , le monde ont besoin
de politique, ils ont besoin de cet antagonisme nécessaire créé par ces visions opposées de la gauche et
de la droite, entre ceux qui veulent une société d’égaux et ceux qui voient en
l’autre un danger… Entre ceux qui disent que c’étaient mieux avant et ceux qui
travaillent à construire un avenir meilleur pour tous. Entre ceux qui se
soucient du déclassement et ceux qui se disent que tant qu’on peut s’en sortir
personnellement, il n’y a pas à s’en faire.
7) Sur l’attitude qui devrait être
la notre, oui, nous estimons qu’un immense chantier s’ouvre pour ce que nous
appelons « la gauche de gouvernement » (en attendant mieux, parce que
le terme n’est pas très joli). Il est
vrai que, loin de la gauche de la posture, la gauche de gouvernement doit
encore créer son projet et sortir des antagonismes qui l’ont amené à un jeu de
massacre mortifère.
8)
Ce jeu de massacre provient essentiellement de ceux qui rêvent
d’une gauche pure. La gauche pure, excuse-moi, je ne sais pas ce que c’est. Je
connais les valeurs que je porte, je sais pour quoi je m’engage et d’ailleurs
pourquoi je me suis engagé depuis un demi-siècle. Je te dirais même qu’au-delà de
moi-même classer quelqu’un de « à gauche » ou « plus à gauche »
ou « moins à gauche » ne me concerne pas. Le radical Mendès France se
démarque de la gauche Molettiste française à référence marxiste en s’engageant
dans la décolonialisation. Savoir s’il était plus à gauche ou à droite n’a
aucun sens. Il était porteur de l’histoire et du progrès alors qu’en face, dans
la posture marxoïde se réfugiaient tous les conservatismes. Les camps
staliniens, la Chine
maoïste condamnant sa population à la famine était ils de gauche ou de droite ?
Cela m’indiffère totalement. Ce qui compte pour moi c’est que les horreurs qu’ils
généraient justifiait tous les combats politiques pour la liberté et l’émancipation
des femmes et des hommes.
Selfie au banquet républicain à l'image de ce que doit être la gauche : joyeuse, lucide, déterminée. |
9)
Pour finir, je ferais cette citation indépassable qui
justifie mon combat politique et dont je suis heureux qu’elle figure sur l’invitation
de la journée du 9 février qui réunira tous ceux qui s’inscrivent dans notre
démarche :
La République doit se construire sans cesse car nous la concevons
éternellement révolutionnaire, à l’encontre de l’inégalité, de l’oppression, de
la misère, de la routine, des préjugés, éternellement inachevée tant qu’il
reste des progrès à accomplir.
C'est le 9 février à Paris, Théâtre Edgar (Métro Edgar Quinet) de 9h30 à 13 h. |
Tu m’excuseras, cher
Louis-Marie, et d’avoir été un peu long à te répondre et de n’avoir répondu que
partiellement à ta question. L’avenir de la gauche est un débat, est un combat
aussi, et tous ceux qui veulent y participer peuvent se joindre à nous.
[1] Comminatoire : qui
constitue une mise en demeure, un avertissement ou une menace ( dictionnaire culturel en langue française d’Alain
Rey)
[2] l’ultra gauche est une vraie famille politique qui, de la
naissance du surréalisme au situationnisme a nourri l’intelligentsia française pendant
un demi-siècle et auprès de laquelle le pâle « Nouveau Parti Anticapitaliste »
fait figure d’une vieille photo polaroid
au sens où elle ne peut ni être reproduite, ni être analysée et ne représente
guère d’intérêt.
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